en

Doom spending : pourquoi les jeunes français dépensent-ils leur argent comme si demain n’existait pas ?

Le phénomène fait rage sur TikTok et Instagram : de plus en plus de jeunes français adoptent un comportement de dépenses compulsives baptisé « doom spending ». Cette tendance, qui touche particulièrement la génération Z et les millennials, révèle un profond malaise face à l’instabilité financière actuelle. Entre résignation et recherche de plaisir immédiat, ces comportements questionnent notre rapport à l’argent et à l’avenir.

Le doom spending expliqué par ceux qui le vivent

Le doom spending, littéralement « dépenses de la fin du monde », s’est imposé comme un véritable phénomène de société. Selon une étude OpinionWay publiée en janvier 2024, près de 35% des 18-35 ans en France reconnaissent avoir augmenté leurs dépenses non essentielles ces derniers mois, malgré une situation financière fragile.

« Je sais que ce n’est pas raisonnable », avoue Emma, 25 ans, alternante dans une agence de communication parisienne. « Avec mon salaire de 1400 euros, je devrais mettre de l’argent de côté. À la place, je m’offre des restaurants, des vêtements de marque… Je me dis que je ne pourrai jamais m’acheter un appartement de toute façon, alors autant profiter maintenant. »

Ce témoignage fait écho à celui de Maxime, 31 ans, développeur web : « J’ai un bon salaire, mais avec les prix de l’immobilier qui explosent et l’inflation qui grignote mes économies, j’ai l’impression que mes efforts d’épargne ne servent à rien. Le mois dernier, j’ai craqué pour une PS5 à 550 euros alors que je m’étais promis d’économiser. »

Les racines d’un comportement qui inquiète les experts

Le cabinet Deloitte a mené une enquête approfondie sur ce phénomène en 2023. Les résultats sont éloquents : 72% des jeunes actifs français estiment qu’ils n’atteindront jamais le niveau de vie de leurs parents. Cette perspective démotive l’épargne à long terme et encourage les achats impulsifs.

La psychologue Marie-Claire Duvall, spécialiste des comportements financiers, explique : « Le doom spending est une réponse émotionnelle à l’anxiété économique. Quand on a l’impression que l’avenir est bouché, dépenser devient une forme d’échappatoire, un moyen de reprendre le contrôle, même illusoire. »

L’impact du numérique sur nos impulsions d’achat

Les réseaux sociaux amplifient le phénomène. Sur TikTok, le hashtag #shopping totalise plus de 500 milliards de vues. Les « hauls » mode et beauté s’enchaînent, montrant des influenceurs déballant leurs derniers achats. Une exposition constante qui normalise la surconsommation.

Les applications de paiement fractionné comme Klarna, Alma ou PayPal ont conquis 30% des 18-35 ans en France. « Je paie tout en 3 ou 4 fois maintenant », reconnaît Sarah, 28 ans. « Ça me permet de m’offrir des choses que je ne pourrais pas me permettre autrement. Bien sûr, à la fin du mois, ça fait beaucoup de petites sommes à payer… »

Un phénomène qui cache une réelle souffrance économique

Les chiffres de la Banque de France dessinent un tableau préoccupant : 40% des moins de 35 ans n’ont pas trois mois de salaire d’épargne de précaution. Le surendettement guette : en moyenne, les jeunes actifs français cumulent 3,2 crédits à la consommation, pour un montant moyen de 12 000 euros.

« On observe une forme de résignation », analyse Thomas Lehmann, économiste à l’OFCE. « Les jeunes générations font face à une triple peine : salaires qui stagnent, inflation qui persiste, et immobilier inaccessible. Dans ce contexte, certains développent une mentalité de ‘profiter tant qu’on peut’. »

Des pistes pour sortir de la spirale des dépenses compulsives

« Le premier pas, c’est la prise de conscience », explique Sophia Renaud, coach en finances personnelles. Elle préconise un retour aux paiements en espèces : « Prenez 100 euros en liquide pour votre semaine. Quand c’est fini, c’est fini. Cette contrainte physique aide à reprendre conscience de la valeur de l’argent. »

Un nouveau mouvement émerge sur les réseaux sociaux : le « slow spending ». L’idée ? Attendre 24 heures avant tout achat non essentiel dépassant 50 euros. Une pratique simple qui permet d’éviter les achats émotionnels.

Une nouvelle approche de la consommation se dessine

Des communautés alternatives se forment sur Discord et Reddit. Les « no buy challenges » gagnent en popularité : pendant un mois, les participants s’engagent à n’acheter que l’essentiel. « J’ai découvert que je dépensais près de 300 euros par mois en achats compulsifs », témoigne Lucas, 27 ans. « Ce challenge m’a ouvert les yeux. »

L’application Goodbudget connaît un succès grandissant auprès des jeunes français. Son principe ? Diviser son budget en enveloppes virtuelles, comme on le faisait autrefois avec des enveloppes physiques. Une méthode qui aide à visualiser concrètement ses dépenses.

La vraie question n’est peut-être pas tant de savoir comment arrêter de dépenser, mais plutôt comment reconstruire un rapport sain à l’argent et à l’avenir. Car si le doom spending traduit un mal-être générationnel, il révèle aussi une capacité d’adaptation : les jeunes inventent de nouvelles façons de gérer leur argent, plus conscientes et collaboratives.

A retenir

  • Selon une étude OpinionWay publiée en janvier 2024, près de 35% des 18-35 ans en France reconnaissent avoir augmenté leurs dépenses non essentielles ces derniers mois, malgré une situation financière fragile.
  • « J’ai un bon salaire, mais avec les prix de l’immobilier qui explosent et l’inflation qui grignote mes économies, j’ai l’impression que mes efforts d’épargne ne servent à rien.
  • Quand on a l’impression que l’avenir est bouché, dépenser devient une forme d’échappatoire, un moyen de reprendre le contrôle, même illusoire.

Découverte nutrition : cette recette riche en protéines fait fureur auprès des nutritionnistes pour un dîner express

Le requin de Headington : l’incroyable monument anti-nucléaire qui défie les toits d’Oxford