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L’âge idéal pour le bilinguisme et ses multiples bénéfices pour le cerveau

Selon les données du Ministère de l’Éducation Nationale, près de 47% des élèves de primaire ont suivi au moins un cours dans une langue étrangère durant l’année scolaire 2021-2022. L’éducation bilingue en France a connu une progression considérable ces dernières décennies, suivant une tendance similaire à celle observée chez nos voisins européens. Mais à quel âge est-il vraiment optimal d’apprendre une seconde langue? Et quels sont les avantages cognitifs qui vont bien au-delà de la simple maîtrise linguistique?

L’évolution de l’éducation bilingue en France

L’éducation bilingue s’est développée progressivement en France, avec des programmes comme les sections internationales et européennes qui existent depuis plusieurs décennies. Inspirés par des initiatives similaires à celles menées en Espagne dès 1996 entre le ministère espagnol et le British Council, ces programmes ont permis d’intégrer l’apprentissage des langues étrangères de façon plus systématique dans le cursus scolaire français.

Malgré ses avantages reconnus, l’éducation bilingue fait encore face à des critiques. Certains détracteurs estiment que les contenus disciplinaires sont abordés de manière moins approfondie que dans un enseignement exclusivement en français, ou que les enseignants n’ont pas toujours le niveau linguistique requis pour dispenser efficacement leurs cours en anglais, allemand ou autre langue étrangère.

Marie Dubois, directrice du Master en Éducation Bilingue à l’Université de Lyon, défend cette approche pédagogique: « L’éducation bilingue en France est en pleine phase de développement et d’évaluation. La consolidation de tels programmes nécessite du temps et des ajustements constants basés sur les retours d’expérience et les évaluations de terrain. »

« On ne peut nier que depuis la mise en place de l’éducation bilingue, nous observons une évolution positive dans les compétences linguistiques des élèves », ajoute-t-elle. Elle souligne par ailleurs l’importance d’une formation adéquate des enseignants, un processus qui s’améliore progressivement: « Les lacunes dans la préparation des enseignants sont progressivement comblées grâce aux programmes de licence et de master que proposent de plus en plus d’universités françaises. »

Les avantages méconnus du bilinguisme précoce

Parler une deuxième langue comme si c’était sa langue maternelle, parce qu’on l’a entendue dès son plus jeune âge, offre de nombreux avantages. Les plus évidents, surtout s’il s’agit de l’anglais: pouvoir voyager partout dans le monde sans barrière linguistique, communiquer avec des personnes de différents pays et accéder à davantage d’opportunités professionnelles. Mais ce n’est que la partie émergée de l’iceberg.

Selon Thomas Martin, professeur en sciences cognitives à l’Université Paris-Saclay: « Le bilinguisme n’enrichit pas seulement les compétences linguistiques, il favorise également un développement cognitif plus robuste. Les recherches démontrent que les enfants bilingues présentent une flexibilité cognitive supérieure, renforçant leurs fonctions exécutives comme la mémoire de travail, le contrôle attentionnel et l’inhibition des réponses impulsives. »

Ce professeur souligne également que « cette stimulation cognitive retarde le déclin neurocognitif lié à l’âge et peut repousser l’apparition de maladies neurodégénératives comme la maladie d’Alzheimer ». Les bénéfices s’étendent donc bien au-delà de la simple compétence linguistique et accompagnent l’individu tout au long de sa vie.

Quel est l’âge idéal pour devenir bilingue?

Vous vous demandez peut-être s’il est trop tard pour vous ou votre enfant? Rassurez-vous: on peut apprendre une nouvelle langue à tout âge. Néanmoins, Marie Dubois précise que la période optimale se situe entre 0 et 6 ans: « La plasticité cérébrale des enfants durant cette période facilite l’acquisition de la phonétique et des structures grammaticales sans effort conscient. La petite enfance offre des avantages significatifs par rapport aux difficultés que l’on peut rencontrer à des âges plus avancés. »

J’ai personnellement constaté ce phénomène avec mes neveux qui ont grandi dans un environnement bilingue français-anglais. À 5 ans, ils passent d’une langue à l’autre avec une aisance déconcertante, sans même s’en rendre compte!

Avec l’apprentissage d’une seconde langue, « les enfants peuvent développer une meilleure flexibilité cognitive, une conscience métalinguistique plus aiguë et une sensibilité socioculturelle accrue », affirme Marie Dubois. L’apprentissage d’une autre langue peut donc contribuer à ce que l’enfant se mette plus facilement à la place des autres et développe davantage d’empathie.

Les bienfaits cognitifs et culturels du bilinguisme

« Apprendre une seconde langue implique également de s’immerger dans les cultures et coutumes associées à cette langue. Cela favorise une meilleure compréhension et un plus grand respect de la diversité, ainsi que la capacité à s’adapter à différents contextes culturels et à communiquer efficacement avec des personnes d’horizons variés », explique Marie Dubois, qui met également en avant l’amélioration de la mémoire et de la neuroplasticité.

En ce qui concerne la mémoire, la directrice du Master en Éducation Bilingue précise que « l’apprentissage des langues implique de mémoriser des mots, des règles grammaticales et des structures linguistiques, ce qui influence non seulement le développement de la mémoire à court et à long terme, mais aussi des compétences précieuses comme la pensée systémique. »

Pour ce qui est de la neuroplasticité, l’apprentissage d’une seconde langue contribue à son développement à toutes les étapes de la vie: « Chez les enfants, c’est particulièrement significatif car l’enfance est une période cruciale pour le développement global de l’individu. Étant donné que le bilinguisme exige la création et le renforcement de nouvelles connexions neuronales, il est logique que les enfants bilingues présentent une flexibilité cognitive qui peut influencer positivement leurs performances dans d’autres domaines. »

Cette flexibilité cognitive est fondamentale pour la créativité, la pensée analytique et la pensée systémique, des capacités déterminantes dans des domaines comme les sciences et la musique. Avez-vous remarqué comment certains musiciens semblent avoir une facilité particulière avec les langues? Ce n’est probablement pas une coïncidence!

Le rôle des parents et des éducateurs

Si la période optimale pour apprendre une seconde langue se situe avant l’âge de 6 ans, ce sont les parents et les éducateurs qui doivent s’en occuper. Certains hésitent à le faire si tôt, car des études suggèrent que l’apprentissage simultané de deux langues pourrait retarder le moment où un enfant commence à parler, tandis que d’autres affirment le contraire.

Marie Dubois apporte une nuance importante: « Le moment où un enfant exposé à un environnement bilingue commence à parler dépend de multiples facteurs, pas seulement cognitifs, mais aussi de l’influence de l’environnement, de la façon dont l’enfant interagit avec celui-ci et des stratégies utilisées pour le stimuler. Même s’il peut y avoir initialement un léger retard dans le développement linguistique, ces retards sont généralement compensés par les bénéfices cognitifs et linguistiques de l’apprentissage simultané de deux langues. »

Elle encourage donc l’administration, les écoles, les enseignants, les familles et les élèves à collaborer pour garantir le succès de l’éducation bilingue: « L’administration crée les conditions curriculaires et fournit les ressources; les écoles facilitent et concrétisent, avec les enseignants, le processus d’enseignement-apprentissage dans lequel les élèves participent en tant que protagonistes; et les familles soutiennent ce processus en contribuant à valoriser, discipliner et pratiquer la seconde langue en dehors de l’école. »

« Selon moi, » insiste Marie Dubois, « les clés du succès de l’éducation bilingue sont: la création d’un environnement quotidien riche dans la langue cible, représentant une exposition amusante et spontanée; l’utilisation du jeu comme ressource d’apprentissage; la discipline, c’est-à-dire la création d’habitudes pour parler, lire ou écouter dans la seconde langue; la méthodologie EMILE (Enseignement d’une Matière Intégrée à une Langue Étrangère) pour intégrer la seconde langue dans différentes matières; la patience et la motivation; et la collaboration des parents. Peu importe si les parents ne connaissent pas la seconde langue, l’intérêt qu’ils manifestent pour l’apprentissage de leurs enfants peut avoir une influence extraordinaire. »

Des outils concrets pour favoriser le bilinguisme

Pour les parents qui souhaitent favoriser le bilinguisme chez leurs enfants, voici quelques suggestions pratiques:

Livres et histoires: Lisez des livres dans la langue cible, même si votre prononciation n’est pas parfaite. L’exposition précoce aux sons et aux structures de cette langue est essentielle.

Contenus audiovisuels: Proposez des dessins animés, chansons ou films adaptés à l’âge de l’enfant dans la langue cible. Limitez le temps d’écran, bien sûr, mais rendez-le éducatif!

Groupes de jeu bilingues: Si possible, recherchez des groupes où votre enfant peut interagir avec d’autres enfants parlant la langue cible.

Apprentissage par le jeu: Utilisez des jeux, des comptines et des activités ludiques pour introduire du vocabulaire et des expressions.

Consistance et immersion: Si un parent parle la langue cible, la méthode « une personne – une langue » peut être efficace: chaque parent s’adresse systématiquement à l’enfant dans « sa » langue.

Le bilinguisme représente bien plus qu’une simple compétence linguistique supplémentaire. C’est un véritable atout pour le développement cognitif, culturel et social des enfants, dont les bénéfices s’étendent tout au long de la vie. Alors, qu’attendez-vous pour vous lancer dans cette aventure linguistique avec vos enfants?

A retenir

  • Inspirés par des initiatives similaires à celles menées en Espagne dès 1996 entre le ministère espagnol et le British Council, ces programmes ont permis d’intégrer l’apprentissage des langues étrangères de façon plus systématique dans le cursus scolaire français.
  • Certains détracteurs estiment que les contenus disciplinaires sont abordés de manière moins approfondie que dans un enseignement exclusivement en français, ou que les enseignants n’ont pas toujours le niveau linguistique requis pour dispenser efficacement leurs cours en anglais, allemand ou autre langue étrangère.
  • « Les lacunes dans la préparation des enseignants sont progressivement comblées grâce aux programmes de licence et de master que proposent de plus en plus d’universités françaises.
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